Le choix des itinéraires est une forme de hasard. On choisit tout à l’avance comme pour se rassurer, on se projette littéralement dans des choses que l’on ne peut prévoir : l’espace, le temps, les formes de relief, les constructions, l’empreinte que l’homme a pu infliger à ces lieux… tout confond l’imagination.

On sent en arrivant que plus rien ne va, les cartes sont passées, les souvenirs fades et le réel trop pressant pour s’y sentir bien. Il faut sortir, partir, quitter un instant la route pour se cacher un peu des relents de ce que la “modernité” a fait de la douceur remémorée, imagée ou fantasmée.

Nous savions que l’océan tombait à notre droite, nous avions vu le soleil y tomber maintes fois, nous avons tourné là, sans hasard donc, mais en attendant l’impossible, un vide.

Il y a juste en bas les vagues qui rentrent, avec une rigueur métronomique, sur cette hanse parfaite ; des rochers accrochés encore un peu à des falaises à l’épaule ronde, des horizons qui avec le jour se sont clarifiés. Il y a Sidi Ifni et sa décrépitude qui nous appelle au loin, ce sera pour plus tard. Tout nous a fait rester encore un peu : pas qu’on ait besoin de plus de temps pour faire le tour de l’endroit car jamais on ne pourra circonscrire les cieux changeants, les reflets sur le sable, l’éclat purpurin des herbes grasses, et les flots sans cesse renouvelés… l’écume est plus blanche ici, mais nul n’a semblé y faire attention jusque là.

Nous faisons face à la courbure du monde qui semble plus palpable là, au creux de nos souvenirs. On ferme les yeux pour se rappeler que la terre n’est pas plate, que le soleil ne se couche pas dans la mer à faire bouillir les eaux et les poissons avec, il y a les mots de Le Clézio dans Le Procès Verbal qui tombent rapidement entre deux vagues qui s’étendent sans fin entre l’horizon et le pied de nos falaises.

Le soleil s’est couché sans dire un mot, nous prêtions pourtant l’oreille.

Good night & good luck… from Vanishing Points on Vimeo

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